Étudier les biens communs par les changements institutionnels : régimes de propriété autour des races animales face à l’innovation génomique
Résumé
Ce papier propose d’adapter le cadre proposé par Schlager et Ostrom (1992) pour analyser les droits de propriété appliqués à la gestion de ressources communes, afin de réaliser une étude dynamique de régimes de propriété dans le cas de la gestion de ressources génétiques animales. Les ressources génétiques animales, et notamment les races de ruminants (bovins et ovins) sont des ressources communes (appartenant à des communautés d’éleveurs) qui ont fait jusqu’à présent peu l’objet de privatisation comparativement aux ressources végétales (variétés appartenant à des firmes). En décrivant l’évolution de différents « régimes institutionnels de sélection » de ces ressources sur le temps long, et leur déstabilisation actuelle du fait de changements politiques et technologiques (notamment dans le cadre de la sélection génomique), nous montrons en quoi ces ressources communes ne sont pas uniquement des ressources biologiques. Elles sont étroitement liées à des ressources informationnelles et des dispositifs de gestion et de production du progrès génétique, qui représentent une forme de propriété intangible. Nous étudions la co-génération de ressources génétiques et informationnelles, en focalisant l’analyse sur l’évolution des régimes de propriété et des structures de gouvernance associés à ce système de ressources. En effet, une analyse uniquement en termes de droits de propriété sur les ressources biologiques ne permettrait pas de comprendre les changements actuels. Nous montrons en quoi ce cadre, pris dans une perspective dynamique, permet de mettre à jour des changements invisibles autrement, notamment la déstabilisation d’un régime institutionnel vu au travers de sa composante informationnelle.