Grammaire et topologie des anticipations. La synthèse du vivant et ses futurs
Résumé
Cet article se focalise sur trois rapports publics sur la biologie de synthèse (MESR 2011 ; IFRIS 2011 ; OPECST 2012). Si ces textes traitent d’une multiplicité de problématiques : épistémiques, organisationnelles, politiques, géopolitiques, sécuritaires, éthiques, légales, économiques ou sociales, cet article se concentre principalement sur la façon dont ils parlent du futur. Pour ce faire, l’article s’inspire de la littérature académique sur la « sociologie des anticipations » qui s’est développée depuis une vingtaine d’années, et qui a montré comment les futurs d’une science sont fabriqués, politisés et mis en débat ; qu’ils sont fabriqués et cadrés d’une certaine façon, ce qui les rend aussi contestables. On verra que les futurs de la biologie de synthèse traversent, et lient entre eux, différents espaces et échelles géographiques : international, nation, région, ville, institution, laboratoire, etc. En même temps, ces anticipations font coexister des objets (des techniques, des disciplines, des groupes de recherche et des laboratoires déjà existants), des projets (des applications potentielles, un paysage scientifique à (re)structurer, des marchés à construire) et des problèmes (des enjeux éthiques, légaux et sociétaux qu’on cherche à résoudre et des débats et controverses qui surgissent). C’est ce lien intime entre objets, promesses, projets, inquiétudes et problèmes qu’une analyse de la topologie des anticipations peut mettre en relief.